Cyclone chido ils ne se sont pas mis a l abri par peur du gendarme

Cyclone Chido : “Ils ne se sont pas mis à l’abri par peur du gendarme”

Le 06/01/2025 à 13:14 0

Dans J'ai vécu un cyclone

Mayotte - Derrière les chiffres et les images de désolation, il y a des histoires humaines. Celle de Jean-Yves RANÇON, kinésithérapeute à Mayotte, est un témoignage poignant des conséquences du cyclone CHIDO. Face à la violence des éléments, il a assisté, impuissant, à la détresse des mahorais. Son récit met en lumière les fragilités d'une île confrontée à des défis sociaux et environnementaux.

Il en a déjà vécu des cyclones, mais là…

Cela fait maintenant 3 ans que Jean-Yves RANÇON vit à Mayotte, où il exerce en tant que kinésithérapeute. Des cyclones, il en a déjà connu plusieurs par le passé. Il a notamment vécu DINA en 2002 dans les hauts de l’Ouest de La Réunion. Il a également expérimenté plusieurs épisodes cycloniques sur l’Est de Madagascar. 

C’est donc un homme averti qui a fait face au cyclone CHIDO. Toutefois, l’expérience mahoraise surpassera tout ce qu’il a vécu jusqu’à présent. Mais au-delà de la violence du cyclone et des infrastructures totalement inadaptées à un tel événement, Jean-Yves nous apporte également ses lumières sur une des autres causes de l’ampleur du désastre : “la non préparation”.

“Mais non à Mayotte il n’y a jamais de gros cyclone”

Lors de ses visites à domicile du vendredi, veille du passage du cyclone, Jean-Yves demandait à ses patients de se préparer à l’arrivée de CHIDO. En effet, le kinésithérapeute habitué à suivre les cyclones a parfaitement conscience que l’île aux Parfums était sérieusement menacée.

Mais la réponse de ses patients fût unanime “mais non à Mayotte il n’y a jamais de gros cyclone, on est protégé par Madagascar”. Certains iront même jusqu’à le reprocher d’être trop craintif. Selon Jean-Yves, bien que les médias locaux ont fait le job d’information, c’est la population elle-même qui ne s’est pas intéressée aux multiples mise en garde.

L’anecdote qu’il raconte ensuite décrit parfaitement l’impréparation et le manque de prise de conscience du danger. Le vendredi après-midi, alors que le scénario du pire semble inéluctable, Jean-Yves RANÇON pense à une maman vivant dans des bangas à Handrema avec un enfant présentant un handicap. Inquiet pour eux, il les appelle afin de leur demander s’ils ont rejoint l’école située en bas du village pour se mettre à l’abri. Elle répond que non.

Il décide alors de s’y rendre en voiture et découvre sur place 4 ou 5 familles entassées dans ce logement de fortune. Jean-Yves tente en vain de convaincre la maman de quitter les lieux avant qu’il ne soit trop tard, surtout que son fils est polyhandicapé. Peine perdue, la famille reste et ne quittera les lieux qu’en plein milieu de la tourmente. Fort heureusement, ils trouveront une maison en béton inachevée à proximité qui leur servira de refuge.

Selon Jean-Yves RANÇON, beaucoup ne se sont pas mis à l’abri par méconnaissance du danger. Pour d’autres, c’est par peur du gendarme. En effet, beaucoup de sans papier pensaient que les alertes étaient un piège pour les arrêter.

3 semaines après le cyclone Chido - images JY RANÇON

3 semaines après le passage du cyclone intense CHIDO, la situation reste particulièrement tendue à Mayotte. Étant donné l'ampleur des dégâts il faudra des années pour que Mayotte se relève - image JY RANÇON

“Bref, intense et presque pas de précipitations”

Le samedi, jour où tout a basculé, Jean-Yves est chez lui. Il sait que sa maison est sécurisée, capable de résister à un cyclone intense. Le mur de l'œil se fait ressentir entre 9h30 et 11h. De son aveu, ce premier impact est qualifié de gentil selon ses propos. Puis l'œil avec l’accalmie centrale. Il décrit ce moment comme incroyablement calme. Il ne constate pas de dégâts, pas de toiture arrachée, la route nationale semble praticable et la végétation n’était pas ravagée. 

Puis, le vent se lève de nouveau. D’abord doucement avec quelques bourrasques. Jean-Yves comprend que l'œil s’en va et que le deuxième mur aborde l’île. Le Kiné explique alors avoir hurlé pour avertir ses voisins “J’ai crié assez fort à la cantonade, attention c’est reparti et ça va être très fort.” Cette fois-ci, les conditions cycloniques seront nettement au-dessus, CHIDO se dévoile avec une violence inouïe.

“Tous les ingrédients étaient réunis pour une catastrophe majeure”

Le cyclone passé, Jean-Yves RANÇON découvre un paysage de dévastation. “Lorsque je suis sorti j'ai pu voir les dégâts impressionnants. La toiture du voisin au milieu de la rue, la nationale jonchée d’arbres, de fils électriques et d’objets en tous genres”. Rapidement, les secours sont arrivés avec tronçonneuses et bulldozer pour libérer le passage sur la route nationale. 

Pour Jean-Yves, le passage du cyclone a révélé les grandes difficultés de Mayotte “habitations insalubres et fragiles, structures des eaux et d’électricité défaillantes”. De plus, il faut ajouter à cela une “absence de culture du risque cyclonique”, comme elle existe par exemple à La Réunion, nous explique le kinésithérapeute. Autrement dit, tous les ingrédients étaient réunis pour une catastrophe majeure. En conclusion, Jean-Yves fait un constat sans appel, “CHIDO a frappé une zone en surpopulation dans des habitats insalubres qui sont indignes de la France”.

 

Où sont les aides ?

Trois semaines après la catastrophe, la vie commence à reprendre un semblant de normalité. Selon Jean-Yves RANÇON, l’eau au robinet fonctionne un jour sur deux. En revanche, pour l’électricité il va falloir attendre. 

Mais le kinésithérapeute à conscience d’avoir une situation privilégiée et s’inquiète du sort du reste de la population. “Pour les autres la galère risque d’être encore longue, très longue. La nourriture reste le problème majeur après l’hébergement. Ce n’est pas qu’il n’y a plus rien dans les commerces mais l’argent manque". 

Par ailleurs, il questionne sur les aides. Où sont-elles se demande t-il ? “Une distribution parcimonieuse et aléatoire, une bouteille d'eau et une boîte de sardines pour une famille, parfois plus si vous avez la chance d’être au bon endroit, selon la commune et le maire. Et les bâches, que l’on dit être distribuées aux copains ou mises de côté. Les mots favoritisme, corruption refont surface de plus en plus fréquemment dans les conversations. Ce n’est pas inédit à Mayotte bien malheureusement”, finit-il par conclure un brin dépité.

cycloneoi

Né au cœur d'une région propice aux phénomènes météorologiques intenses, ma fascination pour les cyclones tropicaux a débuté dès mon plus jeune âge. Mon intérêt pour ces forces de la nature m'a conduit à les étudier de près, afin de comprendre leur fonctionnement et anticiper leur évolution. En 2014, j'ai créé le site cycloneoi pour partager cette drôle de passion et pour informer en cas d'activité cyclonique - Patrick

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